un voyage en morceaux
Dans la ville, cet endroit est recherché.
La ville n’est qu’ombre, rien qu’ombre produite jour et nuit par ses buildings. La lumière du soleil ne passe nulle part, à chaque front de la ville ses rayons sont bloqués, stoppés net par les centaines de buildings. Sur les avenues, aucune forme ne ressort, étouffée par l’ombre qui règne partout.
Il n’y a qu’à cet endroit de la ville qu’entre la lumière du soleil, par une espèce de trouée entre les buildings qui ne se forme qu’à une certaine heure du jour, connue seulement par une petite communauté d’hommes et de femmes. Ceux-ci se retrouvent à cet endroit et à cette heure précis pour ce qu’ils appellent des combats d’ombres. Ils sortent précipitamment de leurs bureaux, quittant téléphones et ordinateurs, ils se ruent dans les ascenseurs pour se retrouver dans la rue, à cet emplacement très peu étendu où leurs corps exposés à la lumière du soleil génèrent miraculeusement – car qui en voit jamais dans la ville ? – des ombres humaines.
Leurs combats d’ombres durent alors à peine quelques minutes, combats furieux, combats sans pitié où tous luttent contre tous, acharnés à défaire l’ombre ennemie, avant que la trouée de lumière disparaisse subitement, et que chaque combattant retourne à l’ombre générale.