extrait du Double de Dostoïevski, traduction d’André Marcowicz
Peut-être, si quelqu’un l’avait voulu, si quelqu’un, par exemple, avait absolument voulu, comme ça, transformer monsieur Goliadkine en serpillière, il l’aurait transformé, il l’aurait transformé sans résistance et sans danger (monsieur Goliadkine le sentait parfois lui-même), et nous aurions obtenu une serpillière, et non un Goliadkine — comme ça, une serpillière sale, dégoûtante, n’empêche, la serpillière, ce n’aurait pas été une serpillière toute simple, ç’aurait été une serpillière avec de l’amour-propre — la serpillière, ç’aurait été une serpillière avec une âme, avec des sentiments, un amour-propre, si ça se trouve, inconscient, des sentiments, si ça se trouve, inaperçus, et enfouis très loin dans les plis sales de la serpillière, mais, bon, des sentiments...